Les lenteurs hivernales.



 Quand les nuages se sont écartés, les crêtes ont dévoilées leur dos pelé par l'hiver. L'arrête osseuse d'un dragon immobile. J'ai pris le temps de regarder ce paysage fantomatique, entre roches, bruyère et nuages. On considère souvent l'hiver comme une saison morte et grise. De ce que j'ai vu ce jour là, je peux vous assurer que le gris n'était pas majoritaire. Seulement en hivers, tout est plus lent, le froid conditionne nos mouvements. Il en va de même pour l’œil qui à besoin de plus de temps pour discerner les formes et les couleurs.

Oui, tout est plus lent. Tout le monde ferme sa porte pour garder la chaleur du foyer.

Les mots aussi sont comptés.

L'hiver me pousse à apprécier cette maison, si grande, si chaude. Cette maison qui bois le soleil dès qu'il daigne pointer par dessus la colline.

Et ce foutu temps qui passe et qui parfois construit des peurs qui n'était pas là au tout début, quand le projet venait juste de naitre.

J'ai l'impression d'une lente ascension, parfois évidente, parfois vertigineuse et dont chaque pas vers le sommet pause une nouvelle question.

Nous devions partir en bateau, puis plus. Un accouchement plus tard, le temps aidant, je me dis que cet immobilisme forcé n'était pas un mal. Nous avons eu le temps de revoir notre projet. Considérer qu'avec nos trois enfants en bas âge, un jardin en dur n'était peut-être pas une si mauvaise idée. Puis une pane, n'importe quelle pane, semble beaucoup plus simple sur terre qu'en mer.

Nous aurions peu renoncer, tout simplement. Mais l'envie d'autre chose s'est lovée en moi, et se manifeste de façon quotidienne à la façon d'un petit caillou dans ma chaussure.

C'est étrange ces périodes tendus vers l'après.

Chaque pas dans la maison est employé à trier, bouger quelque chose, mettre dans un carton. On avance moins vite avec trois petits, mais on avance quand même.

Du bateau, nous sommes passés au camping car. Une maison à roulette, c'est bien aussi !

Et voilà que l'impatience me saisie. La vie ne cesse, par différents moyens, de me pousser à prendre mon temps, et moi je ne rêve que d'une chose : que la maison soit vide, que l'essentiel soit sélectionné, que le véhicule soit acquis et que la route s'offre à nous.

C'est un défis qui me plais et qui me pousse à reconsidérer progressivement toutes sortes de détails de la vie courante. On ne vis pas exactement pareil dans une maison de 100m2 que dans un réduit à roulettes.

Après, pour parler sans ambages, j’oscille régulièrement entre l'envie de tout balancer dans des cartons pour faire un gros saut chez Emmaüs, parce que je ne sais pas bien vendre, j'ai toujours donné. Et aujourd'hui, ce projet, et les 3,50€ que je peux gagner en vendant ma bibliothèque et mon puang à bascule me pousse à abuser de vos bourses et passer des heures vissées à mon téléphone, pour photographier, rédiger des annonces de vente et répondre cordialement à des personnes pas toujours hyper avenantes et souvent fâchées avec la politesse la plus basique.

Mais, à l'image des saisons, tout fini par germer, et si parfois je gronde comme une nuit d'orage en plein mois d'août parce que je me sent épuisée et découragée par la lenteur des choses, les jours qui suivent m'ouvrent leur bras comme un printemps inespéré et bombe ma jauge d'espoir.

C'est ainsi que samedi, rendez-vous est pris pour la visite de ce qui deviendra peut-être notre résidence principale pour les années à venir. Mais sur roulette s'il vous plait !

D'ici là, il peut neiger sur Paris, la lenteur hivernale n'aura pas raison de mes projets.

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