Ils vécurent heureux et eurent quelques petits problèmes de communication.

   Hier, je recevais sur mon portable le message coléreux d'une amie, qui, je ne sais comment, s'est aperçu que son compagnon (majeur et indépendant depuis de longues années déjà) fumait en cachette. Je répondais par un trait d'humour, heurtée par la question pénible : comportons-nous à ce point en mère pour que nos amoureux finissent inlassablement par nous considérer comme telles ?

Parce-que, voyez-vous, à la rigueur, je crois que NOUS (oui, je passe en mode porte parole des femmes fatiguées) n'en avons rien à branler du cancer égoïste qui nous laissera veuves dans le cas présent. Ce qui nous importe et nous insupporte, c'est la partie "en cachette". Soudain, nous passons de la femme à la sorcière qui bride une existence qui n'est pas la sienne, à dada sur son balais de femme d'intérieur.

Oui, l'impression d'être cataloguée mégère d'office, juste parce que nous vivons aux cotés d'un homme. Homme sur lequel, pourtant, nous n'avons aucun pouvoir. Mégère donc, et de fait, notre chère et tendre moitié se met en tête de nous fantasmer un caractère explosif. Donc, on dissimule pour éviter l'affrontement rageur avec madame... Alors que ce qui fait enrager madame c'est de se voir dissimuler des choses, qui justement n'auraient pas à l'être. Et comme, qui peut le plus, peut le moins, ou inversement, la petite machine de l'imagination se met en route comme un vélo bien huilé, et soudain, on se demande quel genre d'informations sont encore cachées si quelque chose d'insignifiant est tût... Crime, compte bancaires au caïman, enfant illégitime, dogue, maitresse en tout genre, implants capillaires, scientologie, poster de Justin Bieber ? On peut partir loin, et vite !

Ah le couple, ce mystère séculaire, cette institution enracinée... Quel merdier. 

En une galipette, je vais vous emmener dans la suite de mes pensées. Avec une autre amie, nous parlions de parité, de modèle de couple, d'attentes réelles et de relations fantasmées. Et voilà où j'en suis arrivée:

Je ne sais pas si je me comporte comme une mère avec mon amoureux. Par la force des choses, sans doute un peu. Mais de toute évidence, je déteste ça, et le rôle, qu'involontairement il me donne et que j’accepte (POURQUOI???) d'endosser. Ce que je sais en revanche, c'est que lui, a un exemple de mère, et de femme au sein du couple. Et c'est là que ça se corse. Parce que même si mon bonhomme est un bon bougre, aidant et volontaire, par rapport au couple parental dont il est issu, c'est, à n'en pas douter, une sorte de super héro de la parité. Et si j'ouvre un peu l’œil dans les maisons que je fréquente, je peux même me vanter d'avoir un keum qui assure grave.

On en vient à mon modèle premier, et c'est la que ça part un peu en sucette. On m'a souvent posé la question de savoir ce que ça faisait d'avoir des parents séparés. Disons que pour moi c'est de naissance, autant dire que c'est inné et que, n'ayant rien connu d'autre, je n'ai pas vraiment de point de comparaison tangible. Dans ce "rien d'autre", j'ai grandis au contact de deux parents célibataires, s'assumant l'un et l'autre et assumant leur enfants, leur maison, leur vie, en solitaire. Partant de là, mon bonhomme n'est plus du tout un super héro de la parité. C'est même un gros handicapé de la vie à deux (la faute au modèle patriarcal hein !). Parce que je ne vois pas mes parents comme des Mac Gyver de la vie quotidienne, loin de là. J'ai laissé toute idéalisation au placard pour les tenter de les appréhender comme ils sont. Mais ce qu'ils ont laissés dans mon éducation, c'est une absence totale de nécessité vis à vis du couple. Être avec quelqu'un pour seulement être avec quelqu'un me semble inutile, le lit vide ne m’effraie pas (à moi la diagonaaaaale), j'aime beaucoup le silence, la solitude est loin de l'aspect phobique qu'on lui prête bien souvent. 

Donc le couple, loin d'être une recherche et une volonté suprême est devenue une simple histoire de personne, une simple histoire d'évidence, une "simple" histoire d'amour. Avec cet amour, j'ai découvert bon nombre de choses, mais aussi les affres de la vie quotidienne et ce que chacun est prêt à mettre dedans. Donc me voilà bloquée entre la réalité de modèles qui traversent les génération, quoi qu'on veuille en dire, et ce que je connais de moi... Puis de lui. Ça pourrait pourtant être assez simple dès le départ, car en l'absence de modèle j'ai tout à construire. On pourrait même risquer de dire que je perçoit l'autre comme autre, et non pas comme continuité de moi-même ou moitié de ma petite personne. Donc dans autre, j’entends aussi caractère distinct, envies différentes, façon de pensée propre etc. Bref, il n'est pas moi, je ne suis pas lui, à nous de trouver notre équilibre avec tout ça. Comme on le fait souvent si bien avec nos relations amicales.

Mais alors pourquoi, pourquoi, POURQUOI tombons nous dans ces pièges bâtards et chronophages qui nous poussent à ce genre de comportements stupides, puériles, inutiles ??? On ment, on cache, on arrange, on exige, on soumet, on délègue, on déconne... On se contorsionne pour trouver le comportement que l'on pense que l'autre appréciera. On tente ainsi d'être de bien piètres médiums, et finalement la seule chose prévisible, c'est la stérilité blessante de ces efforts inutiles.

Puis quand l'histoire d'amour devient une histoire de famille, les modèles et raccourcis sont encore plus délicats à éviter. Mais il est clair que ce que je fais pour mes enfants n'est pas applicable à la personne qui marche à mes cotés, pour la bonne et simple raison qu'elle n'est plus un enfant justement, et que c'était au départ un critère de sélection pour former le couple que je vis aujourd'hui. Je n'admire pas ces femmes qui considère leur mari avec douceur comme le deuxième, troisième ou quatrième enfant de la famille. Je n'admire pas non plus les maris dans cette position. Je me demande où est l’intérêt, pour le couple, pour les enfants réels, pour les deux partis ? A chaque tranche de vie son rôle, à chaque rôle sa tranche de vie.

Et puis voilà, on peut dire autant qu'on le souhaite à nos fils qu'il faut travailler la parité dans la vie de couple, de famille et toutes les autres vies, rien ne vaut l'exemple qu'ils ont sous les yeux. Et c'est peut-être là que la bas blesse. On pourra dire autant qu'on veut à nos petits hommes en devenir qu'ils doivent passer l'aspirateur et donner la purée à bébé, rien ne vaut ce qu'on leur donne à voir, l'exemple premier, celui qu'on encre dans leur mémoire comme les plus beaux contes qu'on lit chaque soirs à leur chevet. 

Les contes des sorcières, des marâtres et des furies en tout genre...

Bref, c'est quand qu'on parle la même langue ? Parce que la parité, c'est un concept aussi tangible que le père-Noël à mes yeux, mais le respect de l'autre dans son individualité et la compréhension qu'on peut tenter de mettre en place, ça je trouve que c'est une bonne option. Non ? Il y a un monde entre être à deux et s'apporter soutiens, entraide et pistes de réflexion et être à deux pour infantiliser, donner la becquée et materner quelqu'un qui n'a plus à l'être depuis belle lurette.

Et puis, à sa planquer derrière un rideau, on prend quand même le risque d'avoir les pieds qui dépassent.

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