Il est un défi que je n'étais pas en mesure de m'imposer avant. Avant quoi ? Aucune idée, mais ma conscience me disait : point tu ne dessineras tes aimés.
Et vu que le travail avec ma conscience prend suffisamment de place comme ça, je n'ai jamais eu le cran d'ajouter de la difficulté.
Ainsi, au fil de mes carnets, je n'ai laissé que l'imagination me guider. Prenant appui sur des corps en papiers glacés si l'inspiration venait à manquer.
Car des carnets, j'en ai par paquet. Combien de fois ai-je commencé à mettre en mots mes jardins secrets. Mais voilà, le support n'était jamais parfait. La récurrente histoire de taille. Et ce papier qui était parfait pour le dessin, mais hautement inconfortable quand il s'agissait d'y apposer ma calligraphie. Et avec le temps le besoin impérieux de me dire s'estompait, j'essuyais un brin de ridicule, me sentant adolescente attardée, cachant mon intime journal sous mes oreillers.
Et finalement, ce besoin d'écrire pour moi, sur moi, par moi, m'est revenu. Et je n'ai pas rencontré de résistance pour le support de cet égoïste exercice, car j'ai pris le premier carnet qui me tombait sous la main, juste assez grand pour y apposer mes gros-mots, juste assez discret pour se glisser dans un sac, de qualité suffisante pour écumer mes différents médiums. Ce fameux carnet dans lequel je prépare mes articles, dessine mes futurs bijoux, note toutes les petites choses importantes, colle les images qui me transportent au coeur de l'inspiration. Ce carnet à tout faire a rejoint la famille de mes carnets de bords. Aucune chance qu'il finisse aux oubliettes de mes archives, il est trop frêle pour ne pas être achevé.
Serais-je assez couillue pour étaler mes entrailles sous les yeux d'un lecteur potentiel ? Aucune idée. Il est en tout cas un exutoire fabuleux pour les jours où la houle se lève sans prévenir et que ma nausée ne trouve aucun récipient à sa convenance.
Et depuis que je suis mère, je me dis qu'un jour, peut-être, ma descendance se posera des questions sur ce que fut la femme derrière la mère. Peut-être que ceci n'expliquera pas tout, mais en tout cas, il restera des écrits sans tabous pour faire sortir les fantômes du placard.
J'ai trouvé le carnet parfait, et derrière lui, l'idée que peut-être je suis en train de me trouver moi aussi. Imparfaite, mais moi-même. Et alors, j'ai pris mes crayons, dépassé cette frousse de froisser les visages si parfaits qui jalonnent ma vie. J'ai décidé de les coucher sur la papier avec mon imparfait tracé.
En voilà un échantillon... Et même si pour vous ils ne sont rien que des anonymes au milieu de votre lecture, je ne vous en tiendrais pas rigueur et vous souhaite un bon week-end.



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