Roulez jeunesse !


Toujours le même trajet, mais au fil des saisons, le paysage mû et m'émeut. Peut-être aussi parce que, maintenant, je prend le temps d'en observer les détails. Où non, c'est peut-être simplement que je m'accorde le droit à l'émotion primaire face à la beauté simple.
Et ce matin, le temps était d'une limpidité vertigineuse à l'heure de confier mon fils à l'éducation nationale. Un Ciel sans aucun nuage, d'un bleu profond. Sur le siège passager, j'avais déposé les livres à rendre à la médiathèque. Et au gré d'un virage le soleil s'est posé sur leurs couvertures plastifiées et a agît en miroir.  L'heure matinale m'aura épargné l'éblouissement subit, mais la clarté s'est étalée  sur mon visage. Cette lumière soudaine a attiré mon œil dans le rétroviseur. Ma tronche avait subitement des airs de studio Harcourt, la couleur en plus, le maquillage en moins.

Et dans ces quelques secondes de narcissisme routier, l'éclairage en contre-plonger aidant, je me suis découvert des traits que je ne connaissais pas. Des petites rides discrètes, juste sous les yeux. Des petites traces témoignant d'un sourire persistant. Des séquelles de haussement de pommettes.

Certaines auraient surement vu leur journée foutue après une telle découverte. Ce n'est pas mon cas. Cette vision éphémère est venu assoir un sentiment qui s'installe au fil des mois qui passe. Mine de rien, il s'en est passé des choses depuis que j'ai commencé à vous parler ici !

Alors, après avoir commencé à prendre soin de ma tête, c'est mon corps qui s'est rappelé à moi. Parce qu'en effet, je n'ai plus tout à fait 16 ans. Parce que parfois, la vie fatigue un peu plus que prévu.
J'ai une vie sportive, mes journées sont rythmées, je bouge, beaucoup... Mais ça ne fait pas tout. C'est bon parfois de se rappeler que son corps est un outil précieux et non pas une machine. Et quand bien même mes muscles travaillent à longueur de journée, ils sont tournés vers un effort égoïste.
Alors, inverser les pôles, et soudain, s'imposer la discipline journalière de penser à soi.

Je ne me suis même pas sentie gourde en achetant un tapis de yoga neuf et un peu rose (un adorable minet avait eu raison du précédent à grand renfort de griffes, paix à sa mousse), un leggings mignon et des altères. J'ai peut-être eu un sourire crétin et quelques éclats de rires face aux vidéos d'entrainement que j'ai déniché sur youtube. Mais c'est bon de rire non ? Et depuis quelques semaines, je m'oblige à prendre cette demi-heure pour moi, quelle que fut la journée. J'étire, je sollicite, j'écoute, j'échauffe, je détends, je fais travailler... Mais aussi, je râle, j'en veux, j'y vais, je pouffe...

Et finalement, les résultats sont là. Tous mes petits bobos sont en train de se résorber sans demander leur reste, mes tensions s'évaporent, mon moral rigole et ma tête me remercient de la mettre au service de la carcasse qui la supporte.

A l'approche de la trentaine, je suis en train d'apprendre à être une femme (attention, pas de raccourcis bâtards, être une femme n'a rien à voir avec un tapis de yoga rose, on parle ici du fait d'arriver à être bien dans ses pompes et de s'accepter quelle que soit la chaussure qu'on porte). Car on ne m'a jamais appris ce qu'était la féminité, et il m'a fallu vomir dans pas mal de montagnes russes pour trouver ma propre définition. Et plus j'avance, plus les brouillons deviennent lisibles et la calligraphie agréable.

Oui, j'aime ces petites rides qui marquent mes expressions. Ils me murmurent que cette foutue vingtaine sera bientôt une affaire classée. Il rôde autour de moi comme un apaisement, quelque chose de doux et durable. Et comme si ça ne suffisait pas, j'écoute Erik Satie, bercée par l'odeur enivrante du Lilas fraîchement cueilli !

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