On vous parfume madame ?



Depuis quelque temps, les odeurs me fascinent. En vrai, mon pif et ses sensations ont toujours eu une place privilégiée dans mon parcours.
Je peux sans effort associer un parfum à une personne, à un endroit ou un moment et laisser la fragrance s'ancrer dans ma mémoire. Elle peut ainsi ressortir, vierge de toute perturbation, des années plus tard, et piquer alors mon émotion.

A un moment hésitant de ma vie, je me suis dit que j'aurais dû faire Nez. En plus, reconnaissez que c'est d'un chic !

Depuis quelques semaines donc, les odeurs me transportent, m'exaltent. L'arrêt du tabac aidant, je retrouve un nez vierge. Les épices de mon thé, le parfum de mon savon, l'odeur de la lessive, le parfum discret des amandes que je croque chaque matin, leur goût aussi, qui discrètement, remontent l’ascenseur de mes sens pour devenir odeur.

En faisant le pied de grue derrière une grippe et des bas de contention à la pharmacie, je me suis retrouvée nez à nez avec le rayon des huiles essentielles. Je venais pour un tube d'homéopathie, je suis repartie avec des odeurs sagement rangées dans leur petit flacon. Mes choix m'ont d’ailleurs fait rire, ils étaient franchement liés au hasard, et en glissant un œil dans un dictionnaire des HE pour aller plus loin que l'odeur justement, je me retrouve avec de quoi soigner tous mes petits bobos du moment. Hasard...

Et à l'heure d'ouvrir ses flacons, je me retrouve comme un junkie, les narines dilatées à vouloir capter le moindre détail, la moindre force de ces essences. J'ai l'impression alors que l'odeur enserre les moindres alvéoles de mon cerveau, se promène dans toute ma tête et m’emmène dans son voyage.
Je suis tellement transportée qu'il m'arrive de quitter l'activité qui me retient pour aller plonger mon nez dans un de ces petits flacons, juste pour le voyage des sens.

Oui, les odeurs et moi affichons une histoire prononcée et assumée. Dans ma famille, rares sont les extravagances olfactives. Ma mère ne portait pas de parfum, jamais. Mon père laissait planer un jour sur deux le parfum très masculin de la mousse à raser. En revanche, ma grand-mère est aussi fidèle en amour qu'en fragrance. Et une autre partie de ma famille use le même parfum avec brio, ce Kenzo pour homme, parfum caméléon qui se distant et se modifie en fonction des peaux et des horizons.

C'est sur celui-ci que j'ai jeté mon dévolu après quelques années d’errance et de non-fragrance.

Mais le point commun qui existe entre tous ces parfums aimés, c'est que leur utilisateurs ne cherchent pas à cacher leur identité olfactive propre. En gros, les gens dont le parfum me transporte savent l'utiliser. Bien loin d'eux la douche que vous offre les vendeuses de Séphora à l'heure ou retentit la question ; "On vous parfume madame ?" alors que vous étiez juste venu acheter un vernis rouge ferrari.
Savoir se parfumer est un art discret et modeste. Sinon, on marche droit vers l'uniformité et les saturations nasales que peuvent provoquer les rues et autres endroits publics ou déambulent certains complexés de l'odeur intime.

J'entends encore ma belle-soeur dire il y a quelque temps : "Mais j'aime les odeurs, les vraies".
Nous ne parlons pas ici de fétichisme, mais il est vrai que l'odeur (naturelle) d'une peau aimée n'a pas son pareil en flacon.

Quand je retrouve mon cocon après quelques jours d'absence, je retrouve aussi les odeurs primaires qui me bercent et auxquelles je suis accoutumée. Et après ces absences, je cours plonger le nez sur l'oreiller de mon fils, dans le cou de mon amoureux, dans les cheveux de ma fille.

Je pense que les mères me comprendront. Vous souvenez-vous, au milieu des odeurs aseptisées de la maternité, l'odeur de votre nouveau-né au premier jour de vie ?

On passera les évidences de la terre chaude que la pluie inonde, l'acidité sucrée du café qui passe, le fondant au chocolat qui cuit dans le four, le premier feu de cheminée qui annonce l'hiver, les jacinthes qui parlent du printemps, le fumet des grillades qui tape directement à la porte de notre ventre...

Quel dommage alors de se cacher sous des litres de parfum. L'odeur d'un corps n'est-il pas le premier pas vers l'amour ?


1 commentaire:

  1. à nouveau un texte qui me parle...
    merci et bonne fin de weekend...

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