Maman.




 Ça à commencé par une vibration. Quelque chose d'infime au fond de ma poche, comme une légère brise sur le dos d'un lac.
J'étais au milieu de nul part, la balade était belle, je n'avais pas envie d'affronter l'inconnu qui s'affichait sur mon téléphone.
Puis, de retour de promenade, c'est sur ma messagerie que ça voix retenti. Puis cette vibration qui recommence, plus vive cette fois-ci, comme le gravier qui plonge après qu'une main joueuse ai tenté de le jeter le plus loin possible.

Et soudain, ce sont tous les téléphones qui se mettent à sonner, cette fois c'est sur, le pêcheur à jeté son appât, ses plombs et ses féroces hameçons. Cette fois c'est sur je suis prise au piège.

C'est cette voix qui me parviens. Cette voix enchanteresse, un peu trop enjouée, qui chante la mélodie du bonheur factice. Cette vois qui durant des années m'a fait remordre à l'hameçon. Cette voix qui anesthésie soudain, qui prononce de bien belles paroles, le temps d'amadouer et que l'hameçon se plante solidement et ne laisse plus aucune possibilité d'évasion.

Et après, c'est l'agonie, le combat inutile, l’asphyxie pure et dure. Et que vienne le coup de bâton, bien placé au creux des cervicales. Le coup de bâton qui, ici, ne tue pas, mais seulement assomme.

Et au réveil, c'est le corps perclus d’insoutenables douleurs, le goût métallique du sang dans la bouche, avec l'angoisse folle d'avoir la certitude de s'être enterrée seule dans la vase, des algues enroulées autour des nageoires, incapable du moindre mouvement.

Voilà ce que j’entends aujourd'hui dans cette voix trop empressée d'être joyeuse. Un miroir aux alouettes, une publicité mensongère, un cassage de gueule à venir, un surendettement affectif menant à la ruine.

Alors cette fois, je la laisse chanter la sirène au permis de pêche éternel. J'ouvrirais pas le bec, quel que soit l’appât.

Et j'y arrive cette fois. Petit poisson est devenu grand.

Mais en raccrochant, j'ai la nageoire qui tremble. Vite, regagner mon anémone et respirer, respirer, respirer. Je n'ai pas mordu à l'hameçon mais j'ai l'impression d'avoir danser comme une folle pour ne pas être ratissée par l'épuisette. Et une fois à l’abri dans mon habitat marin, ce n'est plus l'eau qui m'entoure, c'est moi qui la pisse... Des yeux.

Mais qu'importe si je pleure. Et ces larmes me soulagent, et je les acceptent. Car il faut parfois souffrir pour arriver à pardonner. Se pardonner soi de ne pas avoir été aimée bien.

C'est avoir subi pendant des années des violences invisibles et soudain, d'un coup de nageoire, avoir la force de dire non à son bourreau. Et des nageoires il faut en avoir de belles et fortes quand le bourreau prend la forme de la personne censée vous aimer le plus au monde, vous protéger et vous faire grandir.

C'est Dimanche, bientôt les pêcheur rangerons leur nasse et leur cuissardes, et demain, je considèrerais dans un sourire fier le chemin parcouru !


3 commentaires:

  1. cette histoire me fait penser à celle de ma mère... je lui enverrai sans doute ce billet, je peux ?
    merci de partager ça
    de manière sensible et pourtant si claire...
    sans détails
    sans amertume malgré certainement une immense souffrance
    ces mots "se pardonner soi de ne pas avoir été aimée bien"...
    merci
    et oui, soyez fière de vous, vous pouvez...
    (je m’excuse si je m'impose là, si mes mots sont maladroits...)

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    1. Bonjour Mirabelle,

      Tout d'abord, je tenais à vous adresser un grand merci pour les mots que vous laissez en réaction aux miens.
      C'est le but de ce blog, de ces images, de ces écrits... C'est partager et créer de la réaction.
      Parce que je crois qu'un peu d'universel se cache sous nos "petites" histoires personnelles.

      Bien sur que vous pouvez faire naviguer ce billet sur vos mer(e)s.

      Une belle soirée.

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  2. je vous en prie
    j'aime vos mots, ils me touchent
    ils résonnent...
    je ne sais plus ce qui m'a amenée ici la première fois, mais je reviens avec plaisir...
    merci à vous aussi...

    très bonne journée

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