S'il est un exercice qui, à mon oeil, toujours fait mouche, c'est bien celui là.
Le plus médiocre des aquarelliste, celui qui toucheras le moins ma sensibilité peut, s'il veut me séduire un instant, peut reproduire sommairement sa palette sur un coin de feuille, et hop, le charme opère.
Peut-être parce que je suis amoureuse des couleurs pures, alignées sagement dans leur coffret précieux, attendant d'être inondées, caressées, transformées... Peut-être.
Alors, je me suis adonnée moi aussi à ce petit jeu, a l'occasion de nouveaux achats destinés à venir fleurir ma palette. Hautement conditionnée par mon aquarelliste de mère, je traine avec moi cette palette achetée il y a des années, sans jamais avoir trop osé m'en servir. Je veux dire par là que je ne me suis jamais vraiment pliée à l'exercice de l'aquarelle à proprement parler. Parce que de cette discipline, je ne saisissait que la contrainte de faire comme maman a dit !
Alors j'ai utilisé des raccourcis délicieux, je me suis offert un stock d'encres aquarelle à faire pâlir le moindre marchant de couleur. Je ne me suis jamais risquée au mélange, émerveillée par la pureté et la dureté aussi de ses pigments justes dilués.
Allons, ce serait mentir que de dire que ma palette d'aquarelle n'a jamais fait usage. Ses godets sont usées, certains jusqu'à la corde. Mais je n'en ai jamais fait un usage conventionnel. Car l'aquarelle comme on me l'a enseignée prend vie lorsqu'elle est noyée dans l'eau. La palette doit être sommaire, ce sont les mélanges qui nous permettent d'obtenir la teinte désirée, le noir n'est alors pas nécessaire du tout, et j'en passe.
Seulement voilà, je me suis retrouvée à être coincée entre le respect de la technique et ma foutue envie d'autre chose. De pinceaux en portes plumes, je me suis retrouvée à utiliser mes couleurs par touche, juste pour aplatir de la couleur ici et là.
Et puis, et puis, et puis... j'ai découvert par le biais de la toile des artistes fabuleux dont je vous parlerais un jour, qui n'ont pas eu mes blocages stupides et qui sont passés depuis bien longtemps à autre chose que le ciel en lavis avec leur palette d'aquarelle. Si ce médium conserve son aqueuse liberté, l'utilisation qui en est faite dépasse de loin les paysages automnaux et les scènes marines. C'est con les barrière derrière lesquelles on s'enferme, c'est sot l'éducation et ses jalons qu'on ose pas dépasser.
Je dois avouer que j'avais déjà eu l'audace, il y a quelques années de ça, de m'acheter un tube de noir en cachette. Et la semaine dernière, j'ai sauté le pas. Je suis allé chez le premier dealer de peinture qui m'est tombé sous la carte bleu, et j'ai choisi, avec minutie, les nouvelles teintes qui viendrait illuminer mes classiques. C'est comme choisir une belle et bonne patisserie. J'adore cette petite présentation précieuse qui emballe le godet de couleur. J'aime le mystère qui persiste avant la rencontre révélatrice avec le pinceau humide. Car la teinte du godet sec est souvent un leurre magnifique. Une fois mouillée, la couleur explose, se déchaine, m'émerveille.
Tout ça pourquoi ? Parce que mon amie Anne me disait la dernière fois que l'accès à la création m'était plus évidente, parce que dans un sens j'avais baigné là-dedans. Oui, c'est vrai que j'ai eu accès à des crayons et des pinceaux assez jeune. Mais ce n'est pas un avantage, car quand ceux qui vous élèvent et devant qui vous êtes en admiration sont, en plus d'être des parents, de bon artistes peintre par exemple, leur talent peut vous brider, leur point de vue sur la technique vous enfermer dans un modèle qui n'est pas le votre. Et, pour ça comme pour le reste, il est terriblement compliqué de se détacher de ce que nos parents nous ont inculqués.
Et pourtant, c'est cette même palette en forme de blocage qui m'a suivi dans le moindre de mes déplacement, elle fait partie des objets que je fourre systématiquement dans mes valises. Et aujourd'hui, j'ai décidé de lui donner la vie que je vois pour elle, et non celle qu'on m'avait enseignée pour elle. Je parle un peu d'elle, je parle de moi, je parle surement de vous.
Bon début de semaine, en couleur et sans complexes.

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